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25 Mars 13
Augmentation des taxes sur le gazole routier : une bonne idée ?

Santé, Pollution, Fiscalité, voilà le trident utilisé pour annoncer une très certaine hausse de la fiscalité sur le gazole et son rattrapage avec celle des  supercarburants.

On aurait pu ajouter « logique industrielle » mais on se serait trouvé coincé dans nos contradictions nationales  car cela reviendrait à renvoyer dos à dos les constructeurs automobiles français, qui ont pesé depuis des décennies pour la diésélisation du parc automobile national, et le secteur du raffinage, historiquement conçu pour raffiner des bruts légers plus performants dans la production d’essences,  et  qui pourrait trouver un certain intérêt à un rééquilibrage entre les deux types de carburants routiers.

Les faits & Chiffres

  • En 2012, le gazole a représenté 82% des carburants routiers consommés en France
  • La TICPE appliquée sur le gazole 10ppm est inférieure  de plus ou moins 0,17 €/litre (04/02/2013) à celle appliquée sur les supercarburants.
  • Cette situation n’est pas propre à la France. En dehors du Royaume Uni ou les taxes sur les essences et le gazole sont identiques, tous les autres membres de l’UE ont une fiscalité plus avantageuse sur le gazole.

Pays

Différentiel de taxes en € par litre hors impact de la TVA (10/2012)

Allemagne

0,1840

Belgique

0,1858

Italie

0,1110

Espagne

0,0952

Luxembourg

0,1271

UK

0,0000

 

  • Avec une TICPE sur le gazole de 44,19 €/Hl, la France se situe au 12 ème rang des pays de l’UE en matière de taxation du gazole
  • L’ensemble du raffinage européen est déficitaire en gazole
  • Le raffinage français est importateur net de gazole routier (13,1 MT en 2010) et exportateur net de supercarburants

Les effets d’un rééquilibrage de la fiscalité sont pour le moins hypothétiques.

La durée de renouvellement du parc de VP est en France supérieure à sept ans. Les véhicules diesels récents bénéficient de motorisations et de systèmes de filtration efficaces. Ce sont  donc les voitures plus anciennes qui devraient être prioritairement ciblées, ce qui n’est peut- être pas socialement une bonne nouvelle. C’est aussi potentiellement un risque de perte de part de marché pour les constructeurs français dont les petits moteurs diesels sont encore compétitifs.

Sauf mesures d’accompagnement attractives et donc coûteuses, le report vers des véhicules essence sera donc relativement lent.

Les camions sont tributaires des motorisations diesels. Ils n’ont donc pas le choix. Il est inimaginable, compte-tenu de la fragilité des entreprises de transports et de leurs manque de trésorerie, de leur faire supporter, même en s’appuyant sur un renforcement légal du dispositif de pied de facture, une charge supplémentaire.

L’idée de renchérir les coûts du transport routier au profit des autres modes (rail, fluvial) peut s’entendre,  toutefois plusieurs études en Europe font état d’un maintien des parts de marché du mode routier supérieures à 70% à l’horizon 2030. Dès lors, toute mesure allant vers un renchérissement des coûts pour les transporteurs français, reviendrait à fragiliser un peu plus le pavillon français.

 

En conclusion, les 6,9 Milliards d’Euros  de revenus supplémentaires mis en avant par la cour des comptes ne prennent pas en compte le coût des mesures d’accompagnement qui devraient inévitablement être prises afin d’accélérer le processus de transition, ni les spécificités du parc français de véhicules diesel qui devrait faire l’objet de mesures spécifiques.

Dès lors le jeu en vaut-il la chandelle ?  D’autres pistes ne seraient-elles pas plus efficaces comme par exemple la lutte contre la congestion des axes routiers et des centres urbains ? La santé, l’air et l’économie auraient à y gagner. 

Alors est-ce vraiment une bonne idée ?  Pas sûr ! 

 

Par Philippe Auquière


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